Eden S. Blueman - « Repousse tes limites, elles sont faites pour cela. »

Eden est une jeune fille (enfin, plus tellement) d'un calme surprenant. Eden ne crie pas. Elle ne s'énerve pas. Ceux qui ne la connaissent pas ne l'entendent en général pas. Par contre, une fois que vous aurez fait connaissance avec elle, elle n'hésitera pas à parler ! Eden est gentille, mais elle ne l'est pas trop. Même elle a un peu tendance à se faire marcher sur les pieds.
Eden passe son temps à écrire. Elle essaye cependant de le montrer le moins possible, pour que personne n'ai l'idée de venir lire ce qu'elle écrit, son pire cauchemar. En fait, elle est très pudique avec son petit monde.
Si Eden ne vous suivra pas quand vous ferez la folle devant elle, elle rira aux éclats. Elle n'ira pas vers cette fille qui est assise toute seule dans un coin, mais si cette dernière vient la voir, elle lui répondra avec plaisir.

Je suis née à Londres, en 1937. J'ai grandi avec mon père et ma mère, dans notre minuscule maison en banlieue. Tout allait bien au sein de mon foyer, jusqu'à la mort de mon père, quand j'avais sept ans. C'était cette fichue guerre. Néanmoins, j'ai fini par m'en remettre. J'ai repris le cours de ma vie, avec une personne en moins. Tout a commencé à se bousculer à mon entrée dans l'adolescence.  J'avais treize ans quand mon pouvoir s'est manifesté pour la première fois. J'étais dans la cuisine avec ma mère, quand je me suis sentie grandir d'un coup. Elle s'est mise à hurler. Je ne savais pas ce qu'il m'arrivait. J'ai regardé mes mains ; ce n'étaient pas les miennes. Je me suis levée avec l'impression d'être sur des échasses, et me suis précipitée vers le miroir de la maison. Ce n'est pas reflet que j'ai vu, mais celui de ma mère. J'ai commencé à hurler, à pleurer, comme elle. Ça ne semblait pas réel. « Ça ne peut pas être possible, réfléchis. » me suis-je dis. Et pourtant ça l'était. Je suis redevenue moi-même au bout d'une minute, mais ça m'avait paru être une éternité. Ma mère s'est approchée de moi, dans tous ses états. Aucune de nous deux ne voulait croire ce qu'elle avait vu. J'avais vraiment peur. Peur de moi-même. C'est la pire de toutes les peurs.
Dès le lendemain, elle m'a emmenée chez un médecin. Quand elle lui a expliqué le problème, il nous a traitées de folle et a voulu nous mettre dehors. Et puis le même phénomène que la veille s'est produit : je suis "devenue" le médecin. Mais ce médecin ... J'y reviendrais plus tard. Il a tout d'abord eu peur, comme nous, mais il a trouvé ça fascinant. Il a proposé à ma mère de faire quelques expériences, ce qu'elle a bien sûr refusé. Nous sommes rentré à la maison, puis nous avons quitté la ville. « Ils vont te chercher, maintenant. » m'a-t-elle dit.
Nous nous sommes installées au Pays de Galles, et j'ai commencé à apprendre à maîtriser mon pouvoir. Cela m'inquiéta jusqu'à ce que je rencontre une ombrune, qui me proposa de venir dans sa boucle. Je devais avoir 14 ans. J'ai accepté ses conseils et ses explications, mais pas sa proposition. Je ne pouvais pas abandonner ma mère, c'était impossible. Alors je suis repartie, et j'ai repensé à ce que cette femme m'avait dit. J'ai cru à un cauchemar, mais elle savait tout. C'était forcément la vérité. Je n'ai parlé de cette rencontre à personne.
J'arrivais à peu près à me transformer en tout et n'importe quoi, être vivant ou non, quand ma mère est morte. J'avais 16 ans, en 1953. Je suis rentrée chez moi, un mardi soir, je me souviens, quand je l'ai trouvée éventrée. Mon souffle s'est coupé, mais j'ai trouvé la force pour crier en voyant la même ombrune qui m'était apparue deux ans plus tôt. « Il faut que viennes avec moi, Eden. Ta vie est en jeu. Ils étaient là. Ils vont revenir. » Je n'ai pas réussi à pleurer. Pas tout de suite. J'ai appris qu'ils me traquaient depuis le début. Le médecin ... sans pupilles ... J'ai été contrainte de remettre ma vie entre les mains d'une inconnue.