Administratrice ★Messages : 1357Date d'inscription : 02/01/2015 Feuille de personnage Avatar : Emma Louise Âge : 16 ans Particularité : Maîtrise de la glace | Sujet: Anaïs' nightmares Jeu 7 Juin - 17:20 | |
| - Découverte du Purgatoire:
Une odeur flottait dans l'air. Un fumet métallique, qui pique le nez et inspire la terreur. Je mis un moment avant d'être soudainement prise de nausées et de comprendre que cette odeur, devenue un fluet, était à l'origine du sang. Il faisait sombre, trop sombre pour que je puisse voir d'où venait ce sang. Pourtant ça me collait à la peau, comme une émanation d'essence ou de bois brûlé. Mes cheveux sentaient, je le savais. Et malgré tout ça : il faisait trop sombre, l'air était humide, je ne voyais pas où je me trouvais et j'avais l'horrible sensation d'étouffer. À cause du sang ? De la moiteur de l'air ? Ou de l'obscurité aussi vicieuse qu'assassine ? En tous cas, je n'osais faire un pas. Une grande peur me prit à la gorge et je restai le plus immobile possible. J'entendis d'abord, au loin, un faible cri comme un écho. Mais ce cri était effroyable, c'était un mélange de désespoir et d'épouvante, une panique croissante à l'origine indéfinie. Ce hurlement strident me fit dresser les poils des bras, et je me retins de paniquer, la respiration accélérée, mes yeux scrutant sans jamais se poser le noir de mon environnement. Je tremblais. Il y eut un nouveau cri, comme une furie, une banshee venant me prendre mon âme. Un démon ? Plus rien ne paraissait humain dans l'intonation de la voix, et surtout il paraissait proche, beaucoup plus proche. Je m'attendais presque à sentir une main sur mon épaule et me tirer en arrière. J'entendais mon propre souffle, mon coeur battait dans mes oreilles dans un tambourinement sans fin. L'odeur du sang me monta de nouveau aux narines. Je n'avais droit qu'à deux sens : l'ouïe et l'odorat. Bientôt pourtant s'ajouta le toucher, car je sentis quelque chose remonter le long de ma jambe. Un liquide, encore chaud. Lentement, je m'abaissai et touchai le liquide en question avant de le porter à mon nez. C'est avec horreur que je compris que c'était du sang. Je réprimai un hurlement que je sentais monter dans ma gorge. Et alors, je me mis à courir malgré ma terreur glacée qui cherchait à me clouer les jambes au sol. À chaque pas, c'était comme si mes pas claquaient contre de l'eau, et j'étais éclaboussée. Le sang remontait dans mon pantalon, et l'odeur imprégnait ma peau. J'avais froid, j'avais envie de vomir, de mourir. À qui était ce sang ? Les cris, provenaient-ils du cadavre ? Ou bien une créature me poursuivait-elle dans toute cette noirceur ? Un soudain rire brisa le silence. C'était un rire malsain, un rire qui me fit hurler de désarroi, d'effroi. Je regardai derrière moi, comme si ce mouvement allait me permettre de voir mon poursuivant. Mais même les étoiles étaient parties dans une autre contrée. Elles avaient déguerpi en emportant avec elle toute la lumière possible. Le sang m'arrivait aux genoux, je commençai à avoir du mal à avancer et pourtant je continuais, encore et encore. J'avais envie de vomir, et je ne pus me retenir. La course, mon cœur qui martelait ma poitrine et l'odeur... bon Dieu l'odeur. Je repris ma course plus vite, toujours plus vite. Mes pieds s'enlisaient dans dans... je ne savais même pas ce que c'était ! De nouveau j'entendis ce rire putride et infecte. Je me rendis compte seulement en cet instant que je pleurais d'horreur. Alors que je ne m'y attendais pas, je ne pus plus avancer. Une barrière ou quelque chose comme ça me barrait la route. Je tapotai la surface que je ne pouvais voir à cause de la nuit, et compris bien rapidement qu'il n'y avait pas de porte tant désirée et que je ne pouvais pas non plus passer au dessus. Mon effroi monta d'un cran, et cette fois le cri fut accompagné des gémissements et des hurlements. Des âmes tourmentées, c'était certain, qui réclamaient le salue, voulaient sortir, elles aussi. Elles criaient leur colère, leur honte et leur douleur. Leur insupportable douleur. Intolérable torture et insurmontables tourments. Mais je n'y pouvais rien ! Rien du tout ! La voix ricana de nouveau, et alors je sentis un souffle froid sur ma clavicule. Je me retournai violemment, dos à la surface invisible sans avoir l'impression d'avoir quelqu'un ou quelque chose devant moi. Une main, derrière moi attrapa avec délicatesse mes cheveux, puis descendit lentement dans mon cou. Ce souffle... il sentait... le sang. J'hoquetai et cessai de respirer. La main glissa le long de mon épaule, puis mon bras. Elle me prit le poignet et il y eut un bruit guttural. Je tremblais de tout mon corps, pleurais en silence comme j'avais appris à le faire. Et je compris. J'étais moi-même une âme tourmentée, j'en étais certaine. Je n'avais pas à m'échapper de ces lieux en vérité j'en faisais partie. J'étais une de ces ombres qui criaient en suppliant la délivrance. J'étais une part de ce monde effroyable. Je sanglotais discrètement. Le niveau de sang augmentait, je le sentais et une chose froide me tenait toujours le poignet. Elle me tint plus fermement et d'un nouveau bruit rauque se décala dans mon dos. Une violente douleur me cisailla alors le ventre en deux. J'écarquillai les yeux, essayai de dire quelque chose, et posai mes mains sur mon ventre. Une plaie le scindait en deux laissant mon sang se déverser dans... la rivière de sang. _________________Transpirante, j'ouvris les yeux brusquement en hurlant. Je tremblais horriblement, mon teint était pâle, et mes yeux regardaient chaque détail sans s'arrêter. J'étais au bord de la panique, ma respiration n'avait pas descellé et je sentais toujours le sang. Il me collait aux cheveux, j'en avais sur moi c'était certain ! Je me levai sans plus attendre et me dirigeai vers le miroir pour vérifier. Rien... il n'y avait rien, pas de sang, juste... une rouge et pâle, brillante de sueur. Je me passai une main sur le visage et soupirai longuement, épuisée.
- Mauvais désir.:
J'embrassais William, passionnément. Ses mains me caressaient les omoplates désormais dépourvus de tout vêtement et j'en frissonnais. J'en frissonnais toujours quand je sentais ses paumes passer à quelques millimètres de ma peau. Je tremblais de plaisir en sentant ses douces lèvres effleurer les miennes. C'était des choses, des sentiments, des sensations auxquelles je ne pourrais jamais m'habituer, et c'était tant mieux ainsi. Tout paraissait tellement irréel, comme si ce monde ne m'était pas réservé, comme si William ne devait pas être là, parce que jamais de toute ma vie je n'avais pu savourer de tels moments. Je les réclamai, William aussi, et bordel, bordel que je l'aimais. C'était une douce flamme vive qui brûlait avec douceur dans mon coeur, un picotement diffus et pourtant bien réel quand je le voyais sourire, quand je le sentais proche de moi. C'était une douce dépendance que je ne pouvais plus quitter. Mes mains étaient posées sur son cou, et bien vite je pris les devants. Je l'embrassai dans le cou, et nous nous allongeâmes sur le lit sur notre lit. Je sentais ses mains passer le long de mes cuisses, puis passer sous mes fesses. Et je me tenais au dessus de lui, à embrasser chaque parcelle de son corps qui était à ma disposition, avidement, avec amour, et malgré tout avec une certaine délicatesse. Je passai une main baladeuse sur son entre-jambe et revins brusquement lui mordre les lèvres avec sensualité. Il caressa ma poitrine : j'en divaguais. J'attrapai une de ses lèvres et sans que je ne m'y attende il renversa la balance. William m'attrapa par les hanches et d'un grognement se retourna pour m'avoir en dessous. J'avais de grands yeux écarquillés et un sourire béat sur le visage. Les embrassades ne s'arrêtèrent pas, et mon pantalon glissa lentement pour atterrir au sol, le sien aussi, avec le reste de nos vêtements. Je passai mes jambes autour de son bassin, et me pressai contre lui. Nous eurent tous les deux une sorte de soupir échangé, et il m'embrassa avec plus d'ardeur. Je répondis sans hésitation à ses étreintes et bientôt nous fûmes tous les deux entièrement nus. Je m'apprêtais à accueillir le moment fatidique, lorsque les lèvres qui m'embrassaient se muèrent en lèvres sèches et rudes. Pas celles de mon William. Je rouvris les yeux brusquement. Ce n'était plus lui au dessus de moi, mais le pyromane. Son contact se fit brûlant, et pas brûlant empli d'ardeur et de passion, non, brûlant à cause de ses mains qui prenaient une teinte rouge à cause des flammes et qu'il posa sur ma peau. Ses yeux verts étaient éclairés d'une lueur malsaine, les reflets dorés proche de ma pupille n'étaient plus que dans mes pires cauchemars. Et je les voyais, encore, face à moi. Chaque détail, chaque dégradé restait accroché à ma rétine pour que jamais je n'oublie son horrible visage. Je voulus lui donner un méchant coup entre les jambes, mais j'étais paralysée par la terreur, ce qui ne m'arrivait que rarement, et il avança dangereusement sa main incandescente de mon visage. Je me débattais, je lui crachais au visage, je tentai de le griffer. Mais rien. Alors je hurlai, et je hurlai encore plus lorsque sa main entra en contact avec ma peau et qu'elle grésilla. Une odeur de viande grillée, de bougie fumée, et l'horrible sentiment de n'être qu'un bout de viande en sa possession. Je me réveillai à cet instant, paniquée, une main sur le visage, l'autre sur mes hanches là où se situaient les principales cicatrices de cet homme. Je me souvenais parfaitement de la douleur, cette... incommensurable terreur et ces insoutenables blessures. Je m'en souvenais tellement bien, et j'avais cru... J'avais cru qu'il était là, vraiment là, au dessus de moi alors que... Je m'étais aussi débattue dans mon sommeil : mon oreiller était tombé et les draps étaient en bordel. Comme si je m'étais battue contre des forces obscures. C'était un peu le cas, je m'étais battue contre mes cauchemars, et encore une fois, j'avais échoué.
- Cendres:
La maison de Miss Tit était en feu. Des flammes sortaient par toutes les fenêtres et un halo orange l'illuminait. Comme une bougie sur un gâteau d'anniversaire. Elle n'attendait qu'à être soufflée. Et d'ailleurs... une douce brise venait caresser la charpente déjà enfumée pour accentuer l'intensité du feu. Il redoubla, rugit dans les murs de notre maison, et poursuivit sa course folle, en rongeant et brûlant tout sur son passage. Les enfants criaient, ils criaient et criaient désespérément. Des plaintes et bientôt des gémissements de douleur. Ils volaient, fusaient, comme s'il y avait dans chaque pièce un enfant agonisant. Certains étaient coincés dans la maison, c'était certain, à demander de l'aide d'une voix stridente. Leur don ne pouvait pas les sauver. Le bois crépitait, Miss Tit et Miss Barn Owl volaient au dessus pour essayer de retirer les enfants des flammes, sans y parvenir. Le brasier repeignait l'herbe et toute la forêt de rouge, même le ciel normalement noir semblait être touché par cette torche. Les étoiles avaient une concurrente, un nouveau soleil qui brillait à des kilomètres. C'est ça, la maison était devenue une torche version XXL, et rien ne semblait vouloir arrêter le feu. Pourquoi il n'y avait pas qu'aquakinésiste ?! Il y en avait toujours normalement ! Le teint blême, je fixais, effarée, la maison devenir noir et devenir cendre. Le bûcher grandissait, prenait de l'ampleur et ravageait chaque étage. Où était William ? Et Louis ! J'étais terrorisée par le feu, après l'intervention du pyromane j'avais hérité de la peur incontrôlable de mourir immolée. Peur normalement « normale » justement pour un homme, mais je m'étais toujours dit que j'avais mes chances avec ma glace. Après tout c'était juste de l'eau gelée donc une fois dégivrée peut-être que... Sauf que l'attaque du pyromane m'avait très clairement prouvé le contraire, et je craignais autant le feu que d'être abandonnée. On ne contrôle pas plus ses peurs que ses doutes.
- LOUUUIS ! WILLIAAAM ? REPONDEZ-MOI !
Les ombrunes criaient elles-aussi en oiseau. Elles ne voulaient pas que j'approche, c'était compréhensible, mais je ne pouvais pas rester là. Je ne pouvais pas rester là, dehors, alors que je n'avais aucune idée de où ils étaient ! Et soudainement, j'entendis dans ma tête la voix de Louis. Louis ! Il paraissait essoufflé, et c'était surprenant en pensées mais... Anaïs ! Je... Je... Je suis bloqué le feu est partout ! Bordel Anaïs j'ai peur ! et je n'hésitai pas plus pour me décider. Je jetai un coup d'œil aux oiseaux puis un regard désolé, avant de m'enfourner dans ce suicide. Le feu semblait vivant, il se mouvait et dès que j'entrai un bout de plafond tomba juste à côté de moi, me faisant hurlant. Les étincelles vinrent faire des trous dans mes manches et me brûler la peau. La fumée allait me tuer. Si je ne me faisais pas écrasée avant par la maison qui s'effondrait. Que de réjouissances. J'avais terriblement peur, les voluptes de fumée montaient et stagnaient ensuite au plafond. Je devais marcher courbée pour avoir un peu plus d'air et m'enfoncer un peu plus dans ce cercueil brûlant.
- LOUUUUUIS ? LOUIS T'ES OÙ ?
Je n'eus aucune réponse, excepté une violente brûlure au bras qui me fit souffrir et me rappela douloureusement quelque chose. Je serrai les poings et m'élançai dans l'escaliers en flammes. Le feu me brûlait les chevilles et chaque planche risquait de se briser sous mes pas. Mais bordel ..! Je ne pouvais pas laisser Louis mourir là, il ne devait pas mourir ! Je sautais les marches quatre à quatre quand je parvins au premier étage. Je constatai rapidement que l'escalier pour accéder au second était détruit, impraticable, je ne pouvais plus monter. Celui que je venais de monter finis dans le même état un quart de seconde plus tard. Ma peur augmenta d'un cran : j'étais coincée. Il fallait qu'il soit ici ! Nous pourrions toujours sauter sur la serre du salon et ensuite se rattraper plus au moins ! S'il était là tout était bon mais... je n'osai pas imaginer qu'il soit plus haut...
- LOUIS ! LOUIS S'IL TE PLAIT ! S'IL TE PLAIT DIS MOI QUE TU ES LÀ !
Un craquement sinistre accompagné du bruit de bois qui brûle répondit à mes paroles. Le plancher s'ébranla, et moi avec. Le deuxième étage s'effondrait. Le deuxième étage s'effondrait et j'étais juste en dessous ! Je criai et me jetai en avant pour échapper à une poutre à moitié consumée qui risquait et de me brûler et de m'écraser. La panique, la panique ! Je parvins à geler le tapis sur lequel j'étais tombée, mais tout allait trop vite. Le haut partait en cendre mais le bas aussi. Le feu était partout ! J'étais encerclée, je ne savais même plus discerner mon endroit d'arrivé de mon but... Je ne pouvais plus descendre nulle part. Je me mis à pleurer en silence, et je sentis le feu me consumer, moi. Lentement, de nouveau. Louis n'était pas là, mais les flammes étaient partout, partout, partout...
Je criai de douleur dans mon lit. Essoufflée je me redressai en touchant mes cicatrices. Et le contre coup fut en me rendant compte que Louis était quand même mort, et qu'encore une fois je n'avais pas réussi à le sauver. Je me mis à sangloter discrètement, le visage dans les draps, secouée de tremblements.
- Retour au Purgatoire:
Il était là, derrière moi. Je le savais, je le sentais. Je pouvais encore sentir le contact de sa main dans le bas de mon dos. Il me glaçait d'effroi, de dégoût. J'allais vomir, j'en étais sûre et certaine. Il les avait tous tués, toute la maison, tous, j'en étais persuadée. Ils étaient tous morts, et j'étais sa proie maintenant. Je devais, je devais... arriver dans la forêt, exactement, c'était ma porte de sortie, mon dernier moyen de me sauver. Les branches me lacéraient les bras, comme si elles cherchaient à m'arrêter aussi, même elles voulaient m'enserrer, me retenir, me garder en leur sein. Je suffoquai. De part la course, de part la peur, de part l'odeur infernale du sang qui flottait dans l'air, comme l'odeur de vase dans un marais. Et mes pas ne frappèrent plus frénétiquement le sol, ils s'enfonçaient dans la boue, ralentissaient considérablement. Paniquée, je baissai les yeux vers mes jambes, un liquide noir me montait aux genoux. Il puait la mort. Je me retournai pour vomir, essayais de me retenir à un arbre, mais il n'y en avait plus, je perdis l'équilibre et tombai dans l'eau, non pas de l'eau, dans le sang. Il entra dans ma bouche, je bus la tasse. Il n'y avait plus de forêt, plus rien, que du noir partout autour de moi. J'étais perdue dans mon purgatoire. Comme toujours, j'y replongeais. Ce noir intense, ce sang partout et... Une pression sur mon crâne, dans mon crâne, un marteau frappant les parois de ma tête, à un rythme lent, profond. Mes oreilles entendaient ces lourds frappement, comme des corps qui tombent. Et à chaque choc, le sang affluait, et mon crâne me faisait mal. Le sang remontait dans mes tempes, je posai mes mains sur mes oreilles, pour voir si ce bruit venait du dehors, mais il venait bel et bien de mon être. Et mes jambes lâchèrent, soudainement, et je tombai dans le sang, qui m'arriva à la poitrine. Vidée de toutes mes forces, je finis par m'y allonger, bras et jambes écartés, dans cette eau ensanglantée. J'étais tellement habituée à ce lieu, ce sang, tout était teinté d'une habituelle odeur infecte. En étoile de mer, je me laissais bercer par les remous, mes vêtements absorbant le liquide à la fois noir et vermeil tandis que le courant tiède me caressait les hanches, collait mes cheveux sur mon crâne, encadrait mon visage. Puis, quelque chose me toucha. Je levai les yeux vers l'obscurité infinie qui s'étendait au-dessus de moi, en une vaine tentative de voir ce qui m'avait heurté. Mais je n'y parvins pas, alors je dus me redresser. C'était un corps, sur le ventre. Fébrile, je posai une main pâle sur l'épaule sur macchabée afin de le retourner et de voir qui il était. Le visage sortit de l'océan de sang, mes lèvres se crispèrent. "Louis.." Je me tournai brusquement afin de fuir son visage et à cet instant, un autre cadavre toucha ma cuisse. Paniquée, je trébuchai et vis le visage de William, mutilé. Mon silence de terreur se mua en gémissement de désespoir. Je les avais emportés avec moi au purgatoire, comment avais-je pu être aussi égoïste ? Une main devant la bouche, je retenais mes larmes et mes cris, passant ma seconde main sur son visage gluant de sang. Sa lèvre inférieure était déchirée, son arcade sourcilière aussi, son oeil noir, une balle perforait son crâne. Je caressai doucement ses joues humidifiées par l'océan. J'essayai le plus possible de le nettoyer de tout ce sang, mais rien n'y faisait. Les vaguelettes finissaient toujours par salir de nouveau son visage. Et alors, petit à petit, les corps se mirent à couler, aspirés par le fond, leurs yeux se remplirent de sang. Je posai mes mains rouges sur mes yeux pour échapper de ce cauchemar. Ils étaient partis. Tous. Je fis plusieurs pas en arrière. Le sang montait inexorablement, à mes cuisses, mes hanches, mes seins. Il fallait partir. Je devais fuir, trouver une échappatoire, courir. Mais comment courir quand l'eau était si haute ? Comment ..? Je clignai des yeux, soudainement immobilisée, incapable de faire le moindre mouvement. Un voile noir couvrit ma vision. Je ne vis plus. Plus rien. Que du noir. Quand je pus de nouveau rouvrir les yeux, la forêt était revenue et tout était d'un calme lourd, effrayant. Je déglutis. L'air aussi était lourd, comme en plein orage. Mais aucune pluie ne tombait, pas de tonnerre, rien. Je me tournai, me retournai, me reretournai, essayant vainement de me localiser. Mais tout paraissait différent. Un éclair déchira le ciel et illumina toute la petite clairière dans laquelle je me trouvais. Mais il n'y eut pas plus de bruit, rien. Alors les buissons bougèrent, frémirent. Je fis plusieurs pas en arrière. Un visage fantomatique sortit de l'ombre, les yeux dépourvus d'iris, d'une blancheur éclatante, aveugle. L'estre. Il était là. Il m'avait retrouvée. Je me mordis la lèvre inférieure. Il tenait dans sa main la même arme utilisée pour tuer Louis. Il la pointa sur moi. La colère et la terreur me pétrifiaient, je tremblais. Mes poings se serrèrent. Il continua d'avancer, encore et encore, jusqu'à poser le canon sur mon front. Son doigt se posa sur la gâchette, son sourire se teinta d'ironie, d'une malice malsaine. Il la pressa. Je me réveillai en sursaut, haletante. Je scrutai l'obscurité, paniquée, m'attendant à sentir la balle traverser mon crâne et le faire exploser en un million de petits morceaux de cellules grises ou même le visage de Louis qui me hantait. William dormait juste à côté de moi, je sentais son souffle sur mon épaule, un de ses bras me retenait contre lui. Je posai ma main droite encore tremblante sur la sienne. Quand, en relevant les yeux sur la chambre, je le vis. Au bord des escaliers, il me fixait. L'estre m'avait suivie dans la réalité. L'horreur me prit, me glaça le sang, des sueurs froides perlèrent dans mon dos, ma respiration se fit saccadée. Il avait toujours ce sourire mesquin et cruel, et l'arme, dans sa main. Je serrai ma paume sur le bras de William. Je n'arrivais plus à faire le moindre mouvement, tandis que l'estre avançait vers le lit, en partie dissimulé par l'obscurité. Il ne faisait aucun bruit, à peine existait-il, et pourtant j'avais beaucoup trop conscience du danger qu'il représentait. Plus il avançait, plus mon corps me hurlait de dégager d'ici. Mais j'étais bloquée, coincée, faible et démunie. Il releva son arme, la pointa sur William. Je hurlai. L'estre se volatilisa, William se réveilla brutalement, alors que mes yeux étaient encore rivés vers l'hallucination, pleurant ma peur, pleurant tout mon désespoir, alors que plus aucun mot ne parvenait à sortir pour exprimer ces terreurs nocturnes.
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